Des bribes... Rien que des bribes... [Terminé]

Umbra... Le soleil entamait sa descente et la nuit tomberait bientôt. Tyris savait qu'elle venait de cette ville mais ne se rappelais presque rien et pourtant elle était là... Son esprit la guidait mais elle ignorait qui lui soufflait toutes ces indications.

Traversant une grande rue, la jeune femme en bleu marchait d'un pas lent et cherchait quelque chose... Mais elle même ignorait quoi. Ses yeux mort parcourait l'avenue, et trouvèrent enfin ce qu'ils cherchaient inconsciemment : Une lourde grille noir sans poignée. Un simple cercle de fer avec une inscription au milieu servait d'ornement à cette entrée. La main de l'elfe gagna automatiquement le symbole et la grille s'ouvrit. Alors qu'elle entrait dans le jardin, elle constata qu'il était à l'abandon : l'herbe envahissait tout, les arbres et les hais poussaient sans contrainte et l'allée de pierre était à peine praticable tant la végétation s'était développée. Une voix qui venait de l'extérieur du bâtiment l'interpella. Tyris fit demi tour et regarda l'homme de haut en bas. Il était vieux, crasseux et elle se demanda comment il avait put rester dans ce quartier riche sans se faire virer par la garde.

"Bonsoir jeune fille, j'ignore qui tu est mais si tu n'avais pas le sang des Soulless dans tes veines tu n'aurais jamais put entrer. Cet endroit est maudit, personne n'a jamais osez forcer l'entrer de la demeure, on dit que les âmes des corps qui furent massacrés sont encore dans les lieux et ne partirons qu'une fois qu'elles auront été vengées."

"Qui est-tu... Et que c'est il passé ici?"

"Je ne suis qu'un pauvre homme qui erre dans les rues de cette ville depuis bien trop longtemps, mais j'ai vu des choses, et les atrocités perpétrés ici, je ne les oublierais jamais... Est tu sûre de vouloir entendre mon histoire?"

"Parle brave homme, il faut que je sache..."

"C'était il y a quatre ans, la famille qui vivait ici, les Soulless étaient tranquilles et ne causait de soucis à personne. Leur fortune datait de plusieurs générations et ils se contentaient de l'utiliser avec parcimonie afin que la génération suivante puisse en profiter elle aussi. Un jour des mercenaires sont arrivés, et ce fût un bain de sang. La maitresse de maison fût battu, violée puis immolée devant sa fille alors que la maison était pillé et mise à sac. Tout ceux qui les servaient furent exécutés sans une once de pitié. La garde avait été soudoyée, j'en suis sûre puisqu'elle n'ai pas intervenu ce jour là... Depuis personne n'est entré ici avant toi..."

L'homme semblait avoir terminé son récit et se contentait de la dévisager en silence et la noble ne pût lui répondre, elle était ailleurs et son esprit lui hurlait d'aller voir à l'intérieur.
"Me-merci..."

Elle prit une bourse d'or et en versa une bonne partie du contenu sans compter, l'elfe se sentait comme un spectre à présent... Il lui manquait quelque chose elle le savait.

"C'est moi qui te remercie mon enfant... L'un des seuls regret que j'aurais eu dans ma vie est de ne pas avoir put revoir ton sourire Tyris."

Le temps que la jeune femme interprète ce qu'il venait de se passer, il avait disparu. Mais un nom traversa seul ses douces lèvres de marbre : "Taalann..."
Elle ignorait qui il était, mais ils avaient du se connaitre, le contraire était impossible... Sinon pourquoi avait elle l'impression qu'on lui comprimait le coeur?

Perdue, l'elfe se retourna en direction de la grille qu'elle passa pour la seconde fois. Elle débuta a traversée du chemin dont on ne pouvait voir le bout puis dégaina finalement sa lame pour dégager un chemin. A l'époque les arbres bien taillés devait former une haie d'honneur pour tous les invitées. Aujourd'hui ils se dressaient comme une barrière infranchissable interdisant aux intrus de déranger le repos des morts. Mais un autre guidait ses bras et sa lame abattait seule l'amas végétal. Les rôles étaient échangés, c'était la jeune fille qui était devenue l'instrument, l'arme de l'autre. Ils atteignirent finalement la sortie et Tyris pût contempler l'ampleur de la ruine qui s'était abattu ici. La maison avait brûlée, de nombreux murs c'était écroulés et la bâtisse semblait sur le point de s'effondrer. Le jardin proche était plus dégagé, dénué de tout arbres, il consistait en une grande plaine dont l'impotante taille de l'herbe ne cachait pas encore complètement les morceaux de roches qui y avait roulés.

Ce fût le noir total dans son esprit et une image s'y imprégna peu à peu, puis se mis en mouvement...

*Des serviteurs s'activaient dans tous les sens et traversaient la cour parfaitement entretenue d'un grand manoir, surement un invité de marque à satisfaire....
Une petite fille courrait au milieu d'eux et manqua d'en faire chuter plusieurs. Elle se dirigeait droit vers la noble, son petit visage était orné d'un grand sourire et ses longs cheveux blanc volait librement derrière elle. Ses deux yeux aux couleurs différentes ne pouvaient pas tromper... Tyris se retourna pour voir qui pouvait elle ainsi regarder et tomba nez à nez avec un homme à l'âge déjà bien avancé qui tentait de garder son sérieux en fronçant les sourcils, mais dont les pitreries de l'enfant semblait émécher sa conviction à lui faire des reproches.
"Maitre Taalann! Maitre Taalann! J'ai encore eu un cadeau de mon papa! Regarde!"
Et elle lui montra fièrement sa nouvelle robe, d'un blanc que les rayons du soleil rendaient éclatants. L'ancien ne pût que sourire, cette petite l'attendrissait plus qu'il ne l'admettait et, incapable de la fâcher, il était un bien piètre tuteur.
"On dirait qu'il a encore fait des folies princesse... Allez maintenant viens, plutôt que d'ennuyer ceux qui travaillent, rendons ton temps constructif."*

Un nouveau noir et l'elfe était de nouveau devant le bâtiment en ruine.

Ses pas la guidèrent dans l'édifice. Elle entra dans un hall était vide : les mercenaires avaient donc tout emporté avec eux... Quelques pas hésitant plus à l'intérieur mais il n'y avait personne. Une fine brume blanche dégageait une douce lueur blanche à l'étage. Tyris monta les marches grinçante et fût accueillit par une magnifique femme. La ressemblance avec la jeune fille était frappante, elle se ressemblait même étrangement.

"Mère..."

"Tu ne devrais pas être ici mon enfant, n'en veux jamais à ceux qui on fait ça. Et encore moins à ceux qui l'on orchestré. N'oublie pas qui tu est... Jamais..."

La mère enlaça la fille et la maison gronda. Les derniers mur qui avaient trop subit et qui ne tenait plus que grâce à quelques restes magiques rendait le dernier souffle.

Une nouvelle perte de conscience et Tyris était à nouveau dehors à contempler l'effondrement de ce qui fût jadis sa maison. Aucune trace de sa mère... L'orpheline posa son regard sur son épée, celle ci brillait de la même aura fantomatique que le spectre de la défunte. Elle prononça un prénom à voix basse et l'épée brilla de plus belle. La noble tomba à genoux et hurla, une pression horrible s'exerçait sur son crâne et une vision s'imposa de force à son esprit.

*Sa mère hurlait des injures...
Les corps de nombreux serviteurs jonchaient le sol, tous étaient morts. Une seule femme tenait encore tête aux assaillant malgré son état déplorable, nue, sale et blessé à de multiple reprise. Elle avait trouvée la force de voler la dague d'un de ses agresseurs et de la lui planter dans l'oeil. Le reste de la troupe réussit néanmoins à la mettre hors combat avant de l'attacher à un poteau sur lequel elle termina sa vie, les flammes l'emmenant hors de ce monde.*

"Vois Tyris... Vois ce qu'ils ont fait à ta mère, à tes proches! Ils t'ont tout prit! Tout! Mais nous te vengerons, nous rendrons chaque injure qu'ils t'ont faites avec plus de violence et de cruauté encore. Ta famille m'a vendu son âme contre une partie de ma puissance! Je n'ai qu'une parole... Moi, Vasa le dévoreur, je t'accompagnerais et nous les ferons souffrir... Horriblement. Ton père est l'unique responsable. Maintenant lève toi et cherche, je veille..."

Devant la porte à nouveau fermé du manoir maintenant effondré, une jeune femme était allongée, inconsciente

Konwen observait les alentours, il suivait le mouvement de la foule encore très présente même à cette heure là. Dès qu’il avait quitté le château de ses protecteurs il s’était précipité vers Tenamas. Et bien évidemment, dans le quartier riche, espérant y faire des rencontres intéressantes et surtout bénéfiques. Il avait d’abord été écœuré par le quartier pauvre où il a avait du passer et se sentait bien mieux dans ces rues propres et sécurisées où vivent les nobles. L’épée dénuée de fourreau dans la main, il avançait, nonchalant. L’excitation des premières heures étant passée, sa visite de la capitale commençait à le fatiguer. Et puis la nuit tombait, où allait-il bien pouvoir dormir ? Il n’avait d’autant plus fait aucune rencontre digne de ce nom. De brèves futiles paroles échangées pour finalement ne rien dire. Plongé dans ses pensées, il se cogna brusquement contre une personne. Il s’excusa puis fronça les sourcils.

*Pourquoi tout le monde se précipite de ce côté-là de la rue ?*

En effet, l’avenue jusqu’à présent bien occupée s’était retrouvée envahit d’un côté et déserte de l’autre. Konwen ne comprenait pas, il continua tout de même à avancer dans la foule et écouta les murmures des passants pour tenter d’en savoir plus.

« Ne regarde pas chéri, presse-toi […] »
« Cet endroit est terrifiant, je t’avais dit de ne pas passer ici, tu sais bien que […] »

Konwen soupira, cela ne l’avançait à rien.Tandis qu’il marchait, il aperçut soudain ce qui semblait être un corps allongé.

*Tout cela pour éviter un sans-abri ? Il y a des limites au rejet des pauvres, tout de même…*

« Qui est-ce ? Elle s’est sûrement faite maudire […] »
« […] Soulless […] »
« […] vient se venger ? […] »

Ne comprenant pas grand-chose et curieux se savoir ce qu’il se passait, il s’approcha un peu plus jusqu’à découvrir qu’il s’agissait d’une jeune femme… une jeune femme qui n’avait rien pourtant rien de terrifiant aux premiers abords.

*Peut-être est-ce une riche héritière respectée de tous qui a décidé de dormir là et a demandé à ne pas être dérangée ? C’est plutôt inhabituel mais après tous… les nobles sont parfois bien excentriques.*

L’homme à l’imagination débordante haussa les épaules. Après tout, même si c’était le cas, il ne voyait pas l’intérêt de s’écarter aussi loin… quelle perte de temps. A quelques mètres de ce corps jonchant sur le sol, une idée un peu plus plausible lui vint.

*Mais non… ! Elle est tellement riche et puissante que tout le monde la méprise. Elle s’est sûrement évanouie, oppressée par tous ces regards... ! Elle remerciera généreusement le preux chevalier qui aura accepté de braver l’interdit !*

A cette idée là, Konwen n’hésita plus et s’empressa de rejoindre la jeune femme. De beaux vêtements… une noble à coup sûr. Le sauveur qu’il était ébaucha un large sourire. Une longue épée reposait à ses côtés… elle savait sûrement se battre. Il posa la sienne, retira son gantelet griffés et s’accroupit auprès de celle qui selon lui ferait sa fortune. Il passa délicatement une main dans son dos, la redressa avec le plus grand soin puis posa sa main nue sur sa joue. Son sourire s’effaça un instant.

*Elle est jolie… mais elle semble bien triste… Tant de rumeurs pour une telle personne ? Elle semble plutôt mal en point, elle ne doit sûrement pas dormir…*

Mais ses lèvres se retroussèrent bien vite et il approcha son visage du sien, oubliant complètement l’éthique d’aristocrate qu’il se donnait.

« Tu mérites d’être réveillée par un doux baiser ! »

Leurs bouches séparées de quelques centimètres, Konwen se redressa soudain. Il en avait presque oublié que tout le monde les regardait et l’embrasser ne serait peut être pas très approprié. De plus, si elle le prenait mal, il pouvait dire adieu à sa récompense. Et si elle était vraiment maudite ? Le gentleman indécis poussa un long soupir puis finalement lui tapota simplement la joue.

« Mademoiselle ? Est-ce que vous allez bien ? »

Sa tête bourdonnait. Elle ne savait pas depuis combien de temps elle était la mais ses muscles refusaient toujours de répondre...

L'esprit de Tyris s'éclaircissait peu à peu et elle tentait de remettre les choses dans l'ordre et de comprendre ce qui venait de se passer... Depuis l'instant où elle avait mit le pied dans le quartier riche quelque chose l'avait guidé. La rencontre avec ce vielle homme, celle avec sa mère, toutes ces visions. Le sort qui lui bridait la mémoire semblait avec été affaibli par son arrivé ici... On part son mystérieux guide?
Elle se rappela soudain des deux directives qu'elle avait reçu... L'une lui demandait d'oublier les crimes commis et de vivre en paix. La seconde l'incitait à la vengeance... Une vengeance spectaculaire.
L'image de l'homme était toujours présent dans son esprit mais elle savait maintenant qui elle chassait depuis 4 ans : son père.

La clé de tout ce qui lui était arrivé aujourd'hui était son arme. Elle en était convaincu maintenant, ce n'était pas qu'un bout de métal ouvragé. L'elfe était sûre et certaine que c'était le réceptacle du Dévoreur comme il s'était lui même désigné. En tout cas elle le sentait maintenant avec lui, mais pourquoi l'aura de sa mère avait elle illuminée l'arme? Et elle se rappela du titre de Vasa...

*Faites que je me trompe...*

Ses sens revenais lentement et elle entendait la foule qui passait non loin d'elle, personne ne viendrait l'aider. Vu la ressemble avec sa mère il devait la prendre pour un fantôme... Des voix commencèrent à lui venir distinctement : dans peu de temps toute la noblesse portée sur les ragots serait au courant de cette affaire. En tout cas elle ne devait pas rester ici et pourtant, après plusieurs essais, elle était toujours sur le sol.

*Bouge! bouge! BOUGE!*

Rien n'y changeait, même ses yeux refusait encore de s'ouvrir bien qu'elle sentait doucement que tout revenait. Un petit choc sur sa joue la ramena à la réalité, on lui avait carrément jeté une pierre?

« Mademoiselle ? Est-ce que vous allez bien ? »

Ah non... Quelqu'un avait enfin réagit de manière moins stupide que les autres. Elle lui était reconnaissant mais non elle allait horriblement mal, sa bouche lui fit l'immense plaisir de bien vouloir répondre.

"Je ne peux plus bouger et j'ai mal partout... Je n'ai aucune idée de qui vous êtes mais rendez moi service s'il vous plait, portez moi dans un lieu tranquille. Une bonne auberge ou autre, je peux payer. Et surtout n'oubliez pas mon épée."

Konwen attendait patiemment qu’elle finisse par se réveiller quand soudain elle ouvra enfin la bouche.

« Je ne peux plus bouger et j'ai mal partout... Je n'ai aucune idée de qui vous êtes mais rendez moi service s'il vous plait, portez moi dans un lieu tranquille. Une bonne auberge ou autre, je peux payer. Et surtout n'oubliez pas mon épée. »

Un lieu tranquille… elle pourra payer ? Soit Konwen avait l’esprit mal placé soit cette femme avait une drôle façon de remercier les gens. Quoi qu’il en soit, elle lui demandait de l’aide et en plus elle avait de l’argent, il fallait saisir cette opportunité !

« A vos ordres ma jolie dame ! »

Il s’arma d’un joli sourire et reposa la jeune femme à terre. Le sauveteur improvisé rengaina ensuite l’épée à laquelle elle avait l’air de tenir dans son fourreau puis remis son gantelet. Il réfléchit un moment puis finalement déposa sa propre lame sur corps de la jeune femme après s’être excusé de la gêne. Puis enfin, une main dans son dos, une autre sous ses cuisses et dans un bel effort, voilà, il était debout, l’étrangère dans ses bras et les regards incompréhensifs posés sur eux. Le preux chevalier s’approcha tout de même de la foule, un large sourire aux lèvres.

« Dites-moi où trouver une auberge sinon elle vous maudira tous et qui sait ce qu’il adviendra de vous… ! »

Il ne savait pas pourquoi mais les personnes lui avaient parue apeurées et il avait donc décidé de jouer de cette frayeur. La menace imaginaire ne tarda pas à porter ses fruits.

« P…plus bas ! La terrasse des quatre chemins. »

*Quel nom dénué d’originalité…*

Konwen pris donc la direction indiquée, plutôt amusé par la situation, il s’exclamait bien fort pour qu’on lui cède le passage.

« Damoiselle en détresse, lé héros a besoin d’espace ! »

Ravis de voir que tout le monde s’écartait comme s’il était quelqu’un d’important, Konwen aurait bien profité de la situation un peu plus longtemps mais il vit soudain la pancarte de cette fameuse terrasse aux quatre chemins. Un grand bâtiment richement décoré bien qu’aux couleurs plutôt sombres effectivement situé au carrefour de quatre ruelles. Il posa un instant son regard sur la damoiselle qu’il secourait, lui souriant malicieusement.

« C’est qu’ils vont finir par nous croire en lune de miel ma chère. »

Konwen monta les marches, deux hommes vêtus de noir leurs ouvrirent la porte et un serveur accouru vers eux.

« Messire… madame semble mal en point, que désirez-vous ? »

Konwen ébaucha un large sourire, après tout il était en position de force et pouvait faire ce que bon lui semblait.

« Oh ne vous en faites pas, madame a un peu trop bu ! Oui c’est regrettable mais que voulez-vous… Nous voudrions une table dans un endroit tranquille avec un verre d’eau pour ma charmante compagne et un autre de vin pour moi s’il vous plaît. »

Le serveur l’accompagna jusqu’à un coin silencieux comme il l’avait désiré. Il posa l’épée de son drôle de client sur la table, aida celui-ci à déposer la femme ivre sur sa chaise puis fila chercher leur commande. L’espiègle menteur repris son épée puis plongea les yeux dans ceux sa compagne de fortune.

« Eh bien, maintenant que par mes soins vous êtes à l’abris, aurais-je droit à une explication ? »

« A vos ordres ma jolie dame ! »

Tyris n'avait toujours pas l'occasion de le voir mais il lui plaisait déjà. Son timbre de voix était agréable et il était apparemment serviable. Elle n'oublierait pas non plus qu'il était le seul à être venu l'aider...
L'homme s'excusa même de la déranger avec son épée, c'était bien le cadet des soucis de la jeune femme et elle lui fit savoir dans un murmure. Il ne devait pas être chétif pour la soulever elle et deux épée, bien qu'étant fine, l'elfe était plutôt grande et n'était en conséquent pas de la légèreté d'une plume. Un autre point à ajouter au crédit de son protecteur.

Toujours guidé par sa seul ouïe elle constata qu'il s'exécutait et cherchait effectivement une auberge. La noble aurait pu critiquer sa manière de faire mais au moins le résultat serait la: elle serait à l'abri. En revanche les passant ne risquait pas de les manquer, son garde du corps improvisé traversait la foule à grand renfort de cris, ça pourrait poser des problèmes pour plus tard mais ce n'était pas sa première préoccupation.

Elle apprécia en revanche beaucoup la capacité du jeune homme à user de l'humour à n'importe quel moment. Beaucoup aurait trouvé ça déplacé dans la situation mais Tyris se sentait en sécurité dans ses bras. Elle battit des paupières, la vue revenait doucement mais tout était encore flou. La jeune femme capta son sourire et commençait à distinguer ses traits, trop peu pour émettre un avis mais suffisamment pour se sentir encore plus rassurée. L'elfe fit un grand effort pour lui répondre et sourit à son tour.

Comment avait elle pu sourire? Elle n'en savait rien, ce n'était pas arrivé depuis le temps où remontait ses souvenirs. Le poids d'un regard était sur elle...

*Vasa...*

Le temps qu'elle revienne à la réalité ils étaient dans l'auberge et des gens se pressaient déjà pour les servir. Au moins il ne c'était pas trompé et avait apparemment choisi un lieu de qualité. Il la fit passer pour une fille éméchée par l'alcool... Au moins on ne se poserait pas de question sûr son état. Mais elle avait l'impression qu'il avait plutôt fait ça par jeu qu'en pensant réellement à tout ces détails.

« Eh bien, maintenant que par mes soins vous êtes à l’abris, aurais-je droit à une explication ? »

La noble savait qu'elle ne couperait pas à cette question et y avait réfléchit. Elle ne mentirait pas mais ne lui parlerait pas des choses qui ne regardait qu'elle. Après quelques étirement prudent pour tester à quel point son corps répondait à nouveau et prit un peu de temps pour l'examiner.
Un visage plutôt pâle mais agréable à l'oeil, des yeux rouge comme le sang et une tignasse noire qui dépassait de sa capuche. Ses vêtements était plutôt luxueux, il ne devait pas être du bas-peuple.

"Bon... Par soucis de ne pas vous ennuyer je vais abréger. Je suis Tyris, dernière héritière de la famille Soulless. Vous m'avez récupéré devant mon manoir qui est maintenant en ruine... Il faudra d'ailleurs que j'y retourne prendre quelques affaires. En ressortant après la première visite j'ai perdu conscience et je ne pouvais plus bouger, jusqu'à maintenant où je commence à me sentir mieux."

Le serveur arriva et posa les verres sur la table, elle le remercia d'un léger signe de tête et bu d'une traite avant de reprendre.

"J'espère que je ne vais pas vous attirer de soucis mais restez près de votre épée... En tout cas je vous remercie de votre aide, permettez moi de vous payer une chambre pour la nuit"

« Bon... Par soucis de ne pas vous ennuyer je vais abréger. Je suis Tyris, dernière héritière de la famille Soulless. Vous m'avez récupérée devant mon manoir qui est maintenant en ruines... Il faudra d'ailleurs que j'y retourne prendre quelques affaires. En ressortant après la première visite j'ai perdu conscience et je ne pouvais plus bouger, jusqu'à maintenant où je commence à me sentir mieux. »

Héritière… intéressant, elle possédait visiblement beaucoup d’argent. Un manoir en ruines ? Une perte de conscience ? Ce qu’elle lui racontait là ne l’avançait pas vraiment, simplement à exciter un peu plus sa curiosité, mais il comprenait qu’elle s’abstienne de parler de sa vie à un inconnu. Mais tout de même, au-delà de l’argent qu’il pourrait sûrement se procurer, l’histoire de sa mystérieuse protégée l’intriguait fortement.
L’arrivée des boissons fit sortir Konwen de ses rêveries. Surpris de voir la jeune femme engloutir son verre aussi rapidement, il prit pour sa part grand soin à paraître le plus élégant possible, glissant délicatement ses doigts sous le verre avant d’en boire une modeste gorgée. Il arbora à nouveau un insolent sourire, dévisageant la fameuse héritière.
Il jouait avec elle, bien sûr qu’il n’en voulait qu’à son argent, bien sûr qu’il cherchait à la séduire pour avoir ses faveurs et pourtant…

« J'espère que je ne vais pas vous attirer de soucis mais près de votre épéé […] »

C’était trop tard, il n’écoutait plus. Déjà qu’il s’était surpris à s’intéresser à son histoire, il se mettait maintenant à la dévisager en détails. De longs et soyeux cheveux qui semblaient pouvoir refléter toutes les sources de lumière possibles. Un visage pâle, presque livide après ces événements, un visage qui se voulait inexpressif et pourtant… dans ses magnifiques yeux, l’un d’un bleu azur, l’autre d’un vert émeraude, il pouvait y lire une incommensurable tristesse.
Son sourire s’effaçait au fur et à mesure qu’il s’attardait sur son visage. Il se surprit à ressentir de la peine pour elle, comme s’il partageait sa douleur en un regard. Etrangement obnubilé par l’intensité de son regard, il n’arrivait pas à détourner le sien, plongé dans ses profondes et inattendues réflexions.
Un bref battement de cils le ramena soudain à la réalité. Il avait rapproché son visage du sien. Et pour la première fois depuis une éternité, il était gêné. Il se redressa, but cette fois-ci une gorgée digne d’un ivrogne, reprit son sourire impertinent pour ne rien laisser paraître et entama comme si rien ne s’était passé.

« Des soucis ? Mais il n’y a pas de soucis à se faire ! Après tout malgré les apparences je suis un grand garçon et je sais tout de même me défendre. Mon épée ? Oh vous savez la diplomatie reste le meilleur moyen, la violence ne résout rien, n’est-ce pas ? »

Qu’est-ce qu’il racontait ? Il n’en savait strictement rien lui-même, il essayait simplement de faire passer son trouble par un enchaînement de phrases dénuées de sens. Il se demanda un bref moment s’il ne ferait pas mieux de quitter immédiatement cette Tyris si intrigante mais il ne voulait pas laisser passer sa première occasion de se faire de l’argent.
Il lui fit un clin d’œil comme pour lui prouver que sa confiance en lui était toujours intacte puis finit sa boisson d’une traite, ses yeux devenus rouge sombre à présent rivés sur son verre vide.

« Pour ma part je suis Konwen, Konwen Leviaz. Et je crois que si le destin a fait que je me trouvais là à ce moment si critique dans votre vie ce n’est pas par hasard ! Sauveteur de première classe il est de mon devoir de vous protéger jusqu’au bout ! A vrai dire c’est aussi quelque peu égoïste car si je ne le fais pas, je n’aurais pas la conscience tranquille ! Et grand Dieu sache comme il est agaçant de se sentir coupable. »

Encore des paroles stupides dignes d'un piètre séducteur. Néanmoins Konwen préfèrait pour l'instant en rester à son incessant jeu ironique. Il redressa le visage et fixa à nouveau ses yeux sanguinaires dans ceux de Tyris mais cette fois-ci sans se laisser embarquer dans une quelconque distraction. L'assurance et son charmant sourire lui revenaient enfin.

A peine avait elle fini ses courtes explications que Tyris remarqua que son sauveur la dévisageait avec intensité. Elle lui rendit son regard et lisait dans ses yeux. La désagréable sensation d'être examiné était mince face à l'agréable havre que lui offrait les yeux rouge sang du jeune homme. Ces dernier la regardait avec une telle profondeur qu'elle en était presque gênée. L'inconnu semblait ailleurs et pourtant, il s'approchait lentement d'elle. Comptait il l'embrasser? Elle aurait volontiers accueillit ses lèvres mais ce moment n'arriva pas, il sembla subitement se reprendre. Elle était pourtant sûre qu'il l'avait voulu... La peur d'un refus peut être?

« Des soucis ? Mais il n’y a pas de soucis à se faire ! Après tout malgré les apparences je suis un grand garçon et je sais tout de même me défendre. Mon épée ? Oh vous savez la diplomatie reste le meilleur moyen, la violence ne résout rien, n’est-ce pas ? »

Bien qu'il essayait de reprendre son aisance habituelle il semblait un peu perdue, avait elle fait quelque chose d'étrange ou de déplacé? Elle n'avait pourtant pas l'impression.

« Pour ma part je suis Konwen, Konwen Leviaz. Et je crois que si le destin a fait que je me trouvais là à ce moment si critique dans votre vie ce n’est pas par hasard ! Sauveteur de première classe il est de mon devoir de vous protéger jusqu’au bout ! A vrai dire c’est aussi quelque peu égoïste car si je ne le fais pas, je n’aurais pas la conscience tranquille ! Et grand Dieu sache comme il est agaçant de se sentir coupable. »

Il dégageait à nouveau cette aura d'assurance et reprenais ses petites touches d'humour. Ainsi il s'appelait Leviaz... Le nom ne lui disait rien et pourtant il était bien habillé. Sans doute un nouveau noble ou un garde du corps de riches marchants. L'absence de bijoux affirmait en tout cas qu'il n'était pas d'une ancienne et très puissante famille.

"Je vous en suis reconnaissant Konwen mais le danger dont je vous parle est bien réel. Même si cette nuit nous devrions être tranquille la journée de demain risque d'être agitée... Je vais demander une chambre restez ici je reviens."

L'elfe se leva, priant pour que ses jambes branlantes la porte jusqu'au comptoir. Elles le firent mais elle dut s'appuyer sur le bureau d'accueil pour ne pas s'écrouler.

"Une chambre pour deux s'il vous plait. Avec un peu d'espace ainsi qu'un alcôve pour faire monter un bain chaud."

Elle regagna la table et fit un petit sourire à son protecteur, elle ne comprenait toujours pas par quel miracle elle pouvait sourire. Peut être ses souvenirs en étaient-ils la raison? Elle n'en savait rien mais bien que ses yeux restait neutre, son visage en profitait de se changement qui la rendait moins froide et plus douce encore.

"Sir Leviaz, je n'ai pris qu'une chambre pour nous deux au cas où les ennuis commencerait plus tôt que prévu j'espère que ça ne vous dérange pas?"

Elle lui fit signe de le suivre et monta les marches en direction de la pièce en question, la jeune femme peinait visiblement mais atteignit le haut des marches. Elle entra à l'aide de la clé. Le réceptionniste ne s'était pas moqué d'elle : Une grande pièce avec de beaux meubles en bois sculptés, éclairée malgré la nuit tombant par les derniers rayon de soleil que laissait passer une grande baie vitré. La petit pièce était immédiatement sur la droite et elle y ferait mettre la baignoire quand celle ci arriverait. Son regard capta un détail, anodin pour un tavernier persuadé de servir un couple et non pas deux personnes qui se connaissaient depuis quelques dizaines de minutes : il n'y avait qu'un lit, avec deux places...

« Je vous en suis reconnaissant Konwen mais le danger dont je vous parle est bien réel. Même si cette nuit nous devrions être tranquille la journée de demain risque d'être agitée... Je vais demander une chambre restez ici je reviens. »

Konwen n’eut pas le temps de dire un mot de plus que celle qu’il croyait être une simple riche humaine s’était déjà levée. Ils devraient être tranquilles pour la soirée… Cela signifiait qu’elle acceptait sa présence et qu’il se rapprochait un peu plus de son but. A cette idée, Konwen ébaucha un nouveau sourire. Ne voulant que se concentrer sur son objectif, il fit tourner son verre entre ses doigts pour patienter, ne remarquant même pas que la jeune femme ne tenait à peine debout. Lorsqu’elle regagna finalement la table, elle lui sourit, l’air bien moins triste qu’auparavant. Sourire qu’il lui rendu tout aussi joliment.

« Sir Leviaz, je n'ai pris qu'une chambre pour nous deux au cas où les ennuis commencerait plus tôt que prévu j'espère que ça ne vous dérange pas? »

Comment cela aurait-il pu le déranger alors qu’il n’attendait que cette occasion pour se rapprocher d’elle. Se rapprocher dans un unique but… il voulait s’en convaincre. Il décida qu’il la laisserait dès qu’il aurait eu ne serait-ce qu’une infime somme de sa part. Malgré la forte possibilité d’obtenir plus de sa protégée de fortune, il ne voulait pas se risquer à l’apprécier. Il sentait bien qu’il n’était en pleine possession de ses moyens avec elle et il ne fallait aucunement que cela arrive. Pour l’heure, il était temps de la suivre jusqu’à la chambre.

« Nullement ma chère. Après tout il est vrai qu’il serait ennuyeux de voir l’un de nous deux mort dans sa chambre tandis que l’autre dormait tranquillement. Mais passons, je ne voudrais pas nous attirer la malchance ! »

Konwen esquissa un léger rire puis la suvit dans les escaliers. Elle avait visiblement du mal à arriver jusqu’en haut mais au lieu de lui prêter son bras, il préféra simplement rester derrière elle et la rattraper en cas de chute. Arrivés à la fameuse chambre où ils devraient passer la nuit, Konwen s’extasia. Il n’avait jamais eu l’occasion de voir une auberge de si bonne qualité. La pièce lui semblait immense et digne d’un grand roi pour lui qui n’avait côtoyé que de simples aristocrates. Cependant un détail lui fit presque perdre le sourire. En effet, un seul lit pour deux personnes. Ceci lui aurait donné grande joie s’il avait été avec une autre personne. Mais avec elle il ne voulait surtout pas en arriver jusque là. Konwen savait que sa camarade avait tiqué sur le même détail et il ne tarda pas à lui faire savoir qu’il en était de même pour lui.

« Attendez-moi ici je vais essayer de régler ce problème. »

Il s’engagea à nouveau dans les escaliers et s’approcha de l’homme qui leur avait promis la chambre.

« Excusez-moi messire mais nous avions demandé une chambre avec deux lits. »

« Votre compagne m’a pourtant demandé une chambre pour deux, et non pas deux lits. Je suis navré mais les chambres doubles sont complètes sauf celle que je vous ai attribuée. Il reste néanmoins quelques chambres simples si vous le désirez. »

« Oubliez, pardon pour le dérangement. »

Konwen hocha simplement la tête et rejoignit celle qu’il avait ramené plus tôt. Malgré tous ses efforts, un simple sourire teinté de fausseté se laissait entrevoir.

« Eh bien il faut croire que ceci est la dernière disponible. Mais ne vous en faites pas, je sais que vous êtes exténuée, je voulais laisserai donc bien évidemment le lit. Quant à moi je trouverai un petit coin tout de même agréable, cela ne me dérange aucunement. De toute façon ne restons pas plantés là. »

Il invita la jeune femme à rentrer puis désigna le coin de la chambre le plus éloigné du lit.

« Je me mettrais ici, dos contre le mur, l’épée en mains et les yeux rivés sur vous. Comme cela aucun intrus ne pourra s’inviter et vous aurez le sommeil tranquille. »

Il joint le geste à la parole, s'approcha du coin en question, s'adossa au mur et se laissa glisser contre celui-ci. Le visage un long moment enfouit sous sa capuche, il releva finalement la tête et lui offrit un beau sourire.

« Voyez, c’est parfait. »

Elle n'avait pas eu le temps de réagir que déjà il était partit, Tyris resta seule quelques minutes devant la chambre avec ses pensées. Elle était sûre qu'il lui laisserait le lit si il n'y avait pas d'autre pièce mais la perspective ne l'enchantait guère...
Il revint rapidement elle lu sur son visage la réponse avant même qu'il la donne : il n'y avait pas d'autre chambre. Konwen la convia à entrer et désigna un coin de la pièce.

« Je me mettrais ici, dos contre le mur, l’épée en mains et les yeux rivés sur vous. Comme cela aucun intrus ne pourra s’inviter et vous aurez le sommeil tranquille. »

Elle s'était attendu à ça, mais le laisser dormir par terre... Il s'y dirigea sans attendre et s'y posa, avant de lui offrir un radieux sourire.

« Voyez, c’est parfait. »

Parfait... La jeune femme n'était pas d'accord, il l'avait accompagné et protégé...

"Vous ne pensez pas à l'éventualité de partager le lit avec moi?"

Comme elle s'y attendait il refusa catégoriquement sa proposition, aussi elle n'insista pas plus.
Quelqu'un frappa à la porte.
Elle se dirigea vers le lit, retira son manteau et posa son épée dessus avant de se diriger vers l'entrée et de l'ouvrir. Le personnel montait le bain et tout ce qui allait avec comme elle l'avait demandé. Tyris fit un petit geste de la main à l'intention de Konwen et entra dans la petite pièce qu'elle ferma. Une fois tous ces vêtements enlevés la jeune femme inspecta rapidement son corps: au moins, elle ne s'était pas blessé pendant l'étrange visite de son ancienne maison. Elle fit un brin de toilette et jubila tant l'eau chaude la détendait agréablement après son éprouvante journée.

*Ils sont au courant, ils seront la demain...*

L'elfe savait qui avait parlé dans sa tête... Ne sachant pas comment lui répondre elle hoche bêtement la tête dans le vide. Une fois propre elle quitta le bain et s'enroula dans les fines étoffes qui lui avait été apportées avec le reste et sécha rapidement ses cheveux. Elle retourna dans la pièce principale et regarda Konwen qui semblait s'être endormi, le visage masqué par sa capuche. Il ne devait pas être confortablement installé mais ne semblait pas s'en plaindre. La noble s'approcha du lit et laissa tomber le seul tissu qui couvrait son corps et sa pudeur avant de se glisser dans les draps puis prit l'un des deux oreillers et le balança sur son protecteur.

"Prenez au moins ça et maintenant j'en suis sûre. Demain risque d'être mouvementé."

Tyris posa sa tête sur le second édredon et ferma les yeux. Tous ses muscles terminèrent de se détendre et elle sombra rapidement dans le sommeil. Un sommeil agité par de funeste pensées...
Le monde tournait et l'elfe revivait sans arrêt la dernière scène qu'elle avait vu le jour précédent: la mort de sa mère.

La jeune femme se réveilla subitement en pleine nuit dans un hurlement, en sueur et le coeur battant à se rompre. Elle reprit rapidement conscience du monde alentours et pria pour ne pas avoir déranger son compagnon de chambre.

Dormir avec elle ? Quelle question, bien sûr qu’il avait refusé. Ils ne se connaissaient même pas depuis une journée entière. Et puis tout de même, bien qu’elle était issue d’une noble famille et avait donc en conséquence appris les bonnes manières, ne lui avait-on pas dit qu’on ne partageait pas sa couche avec un inconnu ?

Konwen pestait contre lui-même. Bien souvent il avait du faire face à de telles situations et en avait profité avec plaisir, après tout il restait un homme, mais cette fois-ci c’était différent sans qu’il ne sache pourquoi et c’est ce qui l’énervait.

Le menton posé sur le pommeau de son épée, les yeux rivés au sol, l’homme aux réflexions dérangeantes n’eut pas l’occasion, et Dieu merci pour ses nerfs déjà extrêmement tendus, de voir la jeune femme nue se glisser sans son lit. Pourtant, un oreiller soigneusement offert lui atterrit dessus.

« Prenez au moins ça. Et maintenant j'en suis sûre, demain risque d'être mouvementé. »

Konwen hocha simplement la tête en guise de remerciement et d’affirmation. Il cala le coussin derrière sa tête et observa sa concubine d’un soir dormir. Après tout il était censé veiller sur elle. Mais lui aussi avait eu une dure journée, depuis la matinée il marchait sans relâche et ses paupières avaient du mal à rester ouvertes. Les gémissements même de l’humaine plongée dans ses tourments ne suffisaient pas à l’alerter.

Tandis qu’il somnolait, un cri le fit sortir de sa torpeur. Quoi ? Quelqu’un avait finalement pénétré la chambre sans qu’il ne se rende compte de rien ? Effrayé et se sentant coupable il ne tarda pas à se lever. Tyris le regardait, visiblement honteuse de l’avoir réveillé. Il s’approcha d’elle et comprit qu’il s’agissait d’un cauchemar. Il épousa la pièce du regard, aperçut une chaise et l’emmena à côté du lit avant de s’asseoir dessus. Comme à son habitude, Konwen ébaucha un joli sourire. Et se voulant rassurant, il posa une main sur sa joue puis dit d’une voix calme et agréable :

« Ne vous en faites pas, je veille sur vous après tout. Espérons que ma présence chasse vos songes.»

Un dernier échange de regards, un dernier sourire et la jeune femme ne tarda pas à se rendormir. Quant à lui, Konwen luttait de ton son être pour ne pas fermer les yeux, persuadé que s’il s’endormait quelque chose arriverait. Mais malgré tout, le sommeil lui vint…

~~~~~

Tandis que le soleil s’était déjà levé depuis un moment, Konwen s’était finalement endormit, incapable de résister à l’appel du sommeil. Ce qui n’était pas non plus prévu était la position dans laquelle il se retrouvait. En effet, l’inconfort du dossier de sa chaise l’avait sûrement inconsciemment poussé à trouver une posture plus agréable. Les bras pourtant croisés comme auparavant, sa tête avait tout de même trouvé le moyen de s'approprier un coussin bien plus douillet que le précédent. Un coussin qui n’était autre que le ventre de celle qu’il s’était juré de tenir à distance...

Elle l'avait bel et bien sortit de ses songes, honteuse, l'elfe n'osait pas espérer ce qui arriva : il vint à ses côtés et la rassura. Elle remercia la nuit de masquer sa poitrine complètement découverte maintenant qu'elle était presque assise et s'empressa de tirer les draps.

« Ne vous en faites pas, je veille sur vous après tout. Espérons que ma présence chasse vos songes.»

Il lui caressa la joue, se maitrisant pour ne pas rougir elle lui rendit son sourire. Tyris espérait autant que lui, qu'il fasse fuir ses cauchemars: il fallait qu'elle dorme et ses rêves torturaient son sommeil. La jeune femme s'allongea de nouveau et sombra dans le sommeil, un sommeil beaucoup plus tranquille, rassuré par la présence juste à ses côtés.

Les heures passèrent et le jour se leva...

Fatiguée comme elle l'était, Tyris avait bien dormi. Vu la lumière le jour devait être levé depuis quelques heures déjà, en revanche son compagnon lui devait dormir depuis peu d'heure. Konwen dormait, la tête en appui sur son ventre. La noble n'en fût pas outré comme certains aurait pu l'être, c'était pour veiller sur elle qu'il s'était retrouvé dans cette position...

Elle admira son visage quelques minutes puis décida de se lever. L'elfe décida de le laisser dormir encore un peu, elle glissa son propre coussin sous la tête de son protecteur et se leva sans bruit. Après avoir traversé la chambre enroulé dans un tissu, elle retourna dans la salle adjacente où elle se s'habilla et remit ses cheveux en ordre.

Après un bref coup d'oeil sur le lit elle descendit dans la salle d'accueil et commanda de quoi les restaurer tous les deux. Elle prit elle même les plateaux et remonta dans la pièce qui leur était louée. L'elfe prit soin de ne pas faire de bruit, un serveur l'avait accompagné pour lui ouvrir la porte. Elle le congédia d'un geste de la tête et posa les deux plats sur le lit avant d'aller se mettre aux côtés de Konwen. Tyris lui caressa la joue de la même manière qu'il l'avait fait hier et le secoua légèrement de son autre main.

"Ne sachant pas trop ce que vous aimiez, j'ai pris un peu de tout!"

Lui lança t'elle, bien réveillée et de bonne humeur alors qu'il commençait à sortir du sommeil. La noble prit place sur le lit et attaqua une tartine de pain sans quitter son compagnon du regard, un sourire amical aux lèvres.

Il dormait... il dormait tellement bien. Exténué, il en était arrivé à rêver qu’il s’assoupissait ; confortablement allongé sur des nuages, observant le ciel comme aucun humain normal ne pourrait le faire. Pour une raison inconnue un trou se forma dans le cumulus qui soutenait sa tête et Konwen grimaça. Mais celui-ci reprit bien vite sa forme initiale, au plus grand bonheur du doux dormeur.

Il entendait des bruits de pas. Mais qui pouvait faire autant de bruit sur un sol nuageux ? Des personnes échangeaient de courtes paroles mais il n’arrivait à en distinguer le sens. Puis soudain quelque chose sembla peser à ses côtés. Pourtant il ne voyait rien, seulement l’infinie beauté d’un ciel constamment bleu. Puis une douce bise vint caresser sa joue, l’homme encore entièrement dans son rêve sourit tellement la sensation était agréable mais quelque chose le gêna soudain. Son paradis irréel se mit à trembler, tout disparaissait, s’évaporait…

En réalité Konwen souriait bêtement à Tyris. Et quand celle-ci le secoua pour qu’il se réveille, le visage de l’homme prit une expression terrifiée. Lorsqu’il ouvra enfin -et il était temps- les yeux, le chevalier qu’il était censé être fronça les sourcils. Il dévisageait la jeune femme qui lui souriait, l’air de ne rien comprendre.

A vrai dire il ne comprenait effectivement pas grand-chose, l’esprit encore embrumé par tous ses beaux nuages qui le remplissaient auparavant de joie. Celle qui l’avait réveillé n’avait pas vu faux, il n’avait en effet dormit que quelques heures, nullement assez pour un paresseux comme lui. En conséquence, l’homme aux yeux de sang se redressa, visiblement mécontent.

« Ne sachant pas trop ce que vous aimiez, j'ai pris un peu de tout! »

La fille aux cheveux lumineux lui souriait. Et même si ce n’était aucunement par ironie, il prit ceci comme une moquerie. Contrairement à elle qui semblait de parfaite humeur il était quant lui aussi aimable qu’un nain croisant un elfe.

« J’ai pas faim. »

Il avait répondu sans réfléchir, seulement désireux de contrarier la jeune femme. Et celle-ci allait s’en rendre compte aussitôt puisque le ventre de l’ours mal léché se mit à gargouiller fortement. C’est vrai qu’il n’avait rien mangé depuis le repas midi de la veille. Honteux, il attrapa comme elle une simple tartine qu’il fixa longuement… à moitié réveillé.

Tout prêtait à rire malheureusement. Konwen était encore avachit sur le lit, ses yeux cernés fixant sans comprendre un simple morceau de pain. Il finit par l’engloutir sans aucune élégance malgré ses airs bourgeois qu’il se tuait en général à respecter. Il ne voulait pas s’humilier plus longtemps. Et par pur réflexe d’une personne à moitié dans ses songes, il se leva pour aller s’habiller… Eh oui, pauvre de lui, il avait oublié qu’il avait dormi sans se changer. Et de plus, avant de partir vers la pièce conçue pour, une phrase étonnamment à côté de ce qu’il souhaitait dire lui échappa.

« Bonne nuit. »

C’en était trop ! En plus d’avoir l’impression d’être laid comme un pou, il se sentait affreusement stupide. Le temps de s’apercevoir que ses vêtements étaient sur lui et que sa phrase précédente ne se prêtait pas à la situation ; Konwen se planta face à Tyris, l’air d’un pauvre chien battu ayant remplacé la mine mécontente de son réveil forcé. La voix enrouée, il murmura presque.

« Bon… quel est le programme ? »

« J’ai pas faim. »

Konwen semblait d'une humeur particulièrement mauvaise, il n'avait pas du très bien dormir aussi elle ne lui en tenu pas rigueur.
L'elfe se mordit la lèvre pour ne pas rire quand le ventre de son compagnon poussa une longue plainte, ce dernier décida finalement de s'attaquer à son tour au repas. On aurait pu croire qu'il était somnambule tant ses mouvements étaient lents et laborieux, en tout cas la tartine semblait monstrueusement intéressante... Plus qu'elle en tout cas. La jeune femme s'autorisa un petit sourire.

Alors qu'il se levait, elle attaquait une autre partie du repas, la noble prit un bout de pain et se servit un thé.

« Bonne nuit. »

Une fois encore elle lutta pour ne pas rire et le mettre dans un situation encore plus embarrassante que celle actuelle. En tout cas il sembla s'en vouloir à lui même et décida de revenir à ses côtés avant de lui demander le programme. La noble lui répondit après une courte réflexion où elle bu quelques gorgées, le thé était d'aussi bonne qualité que l'établissement mais elle se retenu in extrémis d'en proposer un tasse à son compagnon: vu son humeur mieux fallait le laisser en paix.

"Je dois passer chez moi prendre quelques affaires et ensuite je passerais voir une ancienne relation, je veux faire reconstruire mon manoir."

Voilà, l'emploi du temps de la journée était posé. Prendre de l'argent et des tenues dans la salle des coffres de son manoir en espérant que l'emplacement lui revienne au moins était elle sûre qu'elle existait. A vrai dire elle comptait beaucoup sur l'aide de Vasa pour ce petit détail pourtant très important puisqu'il serait inutile d'aller voir Jaelis sans une belle bourse d'or. Ce constructeur était d'une efficacité redoutable mais était le roi des voleurs... La jeune femme remercia en silence la bonne fortune qui lui avait fait retrouver une partie de sa tête, à moins que tout soit l'oeuvre du dévoreur?

Elle sortit de la pièce après avoir convié Konwen à la suivre et dévala les marches pour gagner le comptoir.

"Merci pour la chambre patron, je recommanderais votre établissement à mes connaissances."

La formule était plus une politesse qu'une réalité: vu le nombre nul d'amis qu'elle avait la jeune femme n'en parlerais pas à grand monde. Après avoir payé la chambre et donné un agréable pourboire au réceptionniste elle gagna l'extérieur et inspira une grande bouffée d'air. Un rapide coup d'oeil au alentours lui appris que les rues étaient déjà bien remplit par une foule de personnes.

Mais ils étaient là... Elle le savait. Aussi souffla t'elle à son compagnon :

"La menace dont je vous ai parlez hier est toute proche, soyez vigilant même si ils ne se risqueront pas à nous attaquer ici."

« Je dois passer chez moi prendre quelques affaires et ensuite je passerais voir une ancienne relation, je veux faire reconstruire mon manoir. »

Cela sous-entendait malheureusement qu’ils devraient encore aujourd’hui beaucoup marcher. Konwen soupira et ne s’en cacha pas. Ses tourments à propos de son étrange relation avec la jeune femme avaient disparus. Pour l’heure il ne pensait qu’à une chose.

*Vivement la fin. *

Après un moment d’immobilisation de la par de sa compagne aux nuits plutôt agitées, celle-ci l’invita à descendre une énième fois les marches. Konwen, sans le vouloir, lui jeta un regard noir et dit d’un ton tout aussi charmant.

« Allez payer l’aubergiste, j’ai besoin de me rafraichir un moment les idées. »

L’humaine bien réveillée s’exécuta et dévala les marches tandis que lui se dirigea vers la pièce où la femme avait pris son bain la nuit dernière. Il tenait tout de même à rester présentable. L’homme à moitié éveillé sortit un peigne en acre -cadeau d’une damoiselle un peu trop attachée- qu’il rangeait par habitude à l’intérieur de son gantelet aux pointes non acérées puis se coiffa. Lentement, soigneusement, la tête ailleurs…

Qu’était-il en train de faire ? Dans quoi s’embarquait-il ? Il suivait bêtement, aveuglément celle qui l’intriguait malgré lui pour quelques pièces qu’il refuserait d’ailleurs sûrement. Konwen secoua la tête, non, il ne refuserait rien. Il s’accaparerait du plus possible et disparaitrait de sa vie comme elle le fera elle aussi. L’homme aux songes revenus se passa un coup d’eau sur le visage, rangea son outil, respira un bon coup puis alla rejoindre la jeune femme qui l’attendait à l’extérieur de l’auberge, manquant de tomber dans les escaliers par la même occasion.

« La menace dont je vous ai parlez hier est toute proche, soyez vigilant même si ils ne se risqueront pas à nous attaquer ici. »

Menace ? C’était elle qui était une menace pour lui. C’était encore elle qui l’avait embarqué dans sa sombre histoire. Mais c’était lui qui l’accompagnait stupidement. D’aussi mauvaise humeur qu’au réveil, Konwen hocha simplement la tête. L’épée à la main, il était tout de même prêt à réagir en conséquence même si ses yeux embués l’empêcheraient sûrement d’être d’une quelconque utilité.

Ils s’enfoncèrent dans la foule et avancèrent jusqu’au manoir de sa malheureuse protégée. Konwen traînait des pieds et ne faisait aucun effort pour masquer son manque d’entrain vis-à-vis de la jeune femme. Une fois arrivés jusqu’à ce mystérieux bâtiment, sans encombre heureusement, ils se stoppèrent. L’immense grille de celui-ci n’inspirait pas confiance à Konwen et un nouveau soupir traduisit sa pensée. Il la regarda puis attendit ses ordres, tel un vulgaire garde du corps.

La traversé de la ville jusqu'à chez elle se passa mieux que prévu. Tyris savait qu'ils étaient suivi mais n'arrivait pas à savoir où se cachait leurs futur agresseurs, car ils attaqueraient à la première occasion ça elle en était sûre...

La noble gardait constamment une main sous son manteau, prête à dégainer au premier signe d'un menace. Mais rien ne se passa et la grille du manoir fût en vue. Konwen ne semblait pas en grande forme mais elle ferait avec.
D'un touché de la main elle ouvrit la grille et entra avant de se tourner vers son protecteur.

"La maison est vraiment hantée et maudite comme le disent les gens... Je voudrais m'assurer que je suis bien partit avec la malédiction la dernière fois. Je préfère que tu attende ici je ferais vite. Si un fantôme te tuait je m'en voudrais toute ma vie."

Elle entra dans l'amas d'arbre qui barrait la route après la grille et disparu des yeux de son compagnon. L'elfe arriva rapidement au manoir en reprenant le chemin déjà taillé pour elle à son dernier passage. Ses pas étaient cette fois encore guidés, au moins Konwen n'attendrait pas, elle trouverait vite ce qu'elle cherchait.

Une petit bâtisse en ruine, une écurie sans doute. Tyris n'y prêta pas attention mais ses pas l'y guidèrent et son corps s'arrêta en plein milieux d'un box. Sans la paille qui devrait autrefois la recouvrir la trappe devait être impossible à trouver mais la jeune femme entra dans le souterrain sans problèmes.

Un mince couloir qui pouvait à peine laisser passer deux personnes de front taillé dans le sol même et soutenu par quelques poutre formait le tunnel qu'elle traversa rapidement. Il était étrangement éclairé par de petits cristaux dorés qui diffusaient une agréable lumière. L'elfe gagna rapidement le bout et tomba devant un mur, une paroi banale l'aurait attristée mais celle ci la brillait de magie.

Une fois encore ce fût son sang qui lui ouvrir la voie. La propriété entière semblait la reconnaitre et la guider dans son sein, le mur s'ouvrir d'un simple contact et dévoila ce qu'elle convoitait: la salle du trésor de sa famille. Entièrement creusé dans le sol puis recouverte de pierre, elle aurait fait mourir d'angoisse une personne claustrophobe, ce que Tyris n'était heureusement pas. Elle n'était en revanche pas très à l'aise mais fût rassurée, violer la sécurité de cette salle l'aurait tout bonnement faite effondrer, au moins personne ne la volerait.
Elle récupéra plusieurs bourses d'or pour ses projets et récupéra un sac dans lequel elle fourra quelques affaires. Cette salle était un présent divin pour elle: sa garde robe avait dangereusement diminuée en quatre ans.

C'est en courant qu'elle rejoignit Konwen à l'entrée, un grand sourire au lèvres.

"J'ai ce que je voulais. Désolé pour l'attente on peut repartir!"

Lui lança t'elle sur un ton enjoué alors qu'elle devinait qu'il devait surement avoir mal prit qu'elle le laisse la et devait être d'encore plus mauvaise humeur qu'à son réveil.

"Maintenant, direction le quartier commerçant. Et surtout, on reste sur l'axe principal."

Tyris ouvrit l’impressionnante grille d’une étrange façon. Et à peine eut-elle franchit celle-ci qu’elle posa clairement les conditions.

« La maison est vraiment hantée et maudite comme le disent les gens... Je voudrais m'assurer que je suis bien partie avec la malédiction la dernière fois. Je préfère que tu attendes ici je ferais vite. Si un fantôme te tuait je m'en voudrais toute ma vie. »

« Hant… »

Il n’eut pas le temps de répondre, elle était déjà partie faire ses affaires. Une maison hantée ? Et lui qui croyait à de simples rumeurs servant à faire flancher la jeune femme. Si elle était partie avec la malédiction ? Qu’est-ce que c’était encore cette histoire ? Il ne comprenait rien et son cerveau ramollit ne l’aidait d’aucune façon.

N’empêche que maintenant il était là à attendre, seul, avec des présumés assassins aux trousses.

*Bon sang, plus jamais de ma vie je ne m’encombre d’une fille trouvée sur le sol.*

Konwen soupira. Il ne prêtait même plus attentions aux personnes intriguées de leur venue qui lui lançaient des regards suspicieux. Il est vrai que de une il avait emmené la fille à l’auberge et qu’ensuite il revenait au même endroit, en bon protecteur soumis qu’il était.

Et puis il avait faim, n'ayant mangé qu’un morceau de pain qu’il avait longuement contemplé. Et il était fatigué aussi, tellement fatigué… pourtant la journée risquait d’être tout aussi éprouvante si ce n’est plus. Plongé dans ses profondes pensées, il sortit à nouveau son peigne, nullement gêné d’exécuter son démêlage devant tous les passants. Il n’entendit pas même Tyris arriver. Elle reprenait son souffle, visiblement elle avait couru.

« J'ai ce que je voulais. Désolée pour l'attente on peut repartir! »

*Heureusement, on ne fait pas attendre n’importe qui comme ça !*

Mais tout de même… la mine enjouée de sa compagne était si agréable à voir. Lui qui avait pu lire une si profonde tristesse incrustée dans ses yeux. C’est ainsi qu’il se surprit à sourire sans pousser le moindre soupir.

« Maintenant, direction le quartier commerçant. Et surtout, on reste sur l'axe principal. »

Il avait tant de questions en tête, mais aussi l’incroyable paresse de parler de tout cela maintenant. Il suivit donc une nouvelle fois la jeune femme, visiblement sûre de son chemin. Elle paraissait si méfiante et attentive qu’un insecte n’aurait pu sortir de son trou sans qu’elle ne s’en aperçoive.

La vie joyeuse de cette ville bruyante qui lui avait parue si attrayante paraissait maintenant à son cerveau fatigué un vrai cauchemar. Qu’est-ce qu’il avait mal à la tête. Il traînassait tel un mollasson aux côtés de la femme débordante d’énergie. Celle-ci sembla trouver ce qu’elle cherchait, une échoppe où elle l’invita à entrer. Elle s’excusa une nouvelle fois de le laisser seul puis rejoignit un homme qui semblait être le présumé constructeur qu’elle cherchait.

Les paupières lourdes quant à lui, Konwen s’adossa à un mur. Le cerveau fatigué, le ventre criant famine, le corps alourdit… Il avait toujours vécu sainement et n’était aucunement habitué à des journées si agitées pour des heures de sommeil si peu nombreuses. C’est ainsi que ses yeux se fermèrent d’eux-mêmes et que son corps tout entier se laissa glisser le long de la paroi. Ce n’était pas un malaise non, plutôt une réaction normale d’un corps fatigué qui cherche une position confortable. Et tandis que Tyris s’entretenait avec l’homme, Konwen s’endormit sans crier gare, la tête posée sur ses genoux…

La jeune femme s'était élancée dans la ville. Finalement Konwen semblait aller un peu mieux que tout à l'heure bien qu'il semblait toujours sur le point de s'écrouler de fatigue. Elle traversa la rue en examinant minutieusement toutes les personnes qu'ils croisaient, la noble savaient qu'ils étaient là et pourtant impossible de le voir dans cette maudite foule. Tout le monde lui paraissait suspect et elle laissa finalement tomber ses recherches, la frustration commençant à la gagner.

*Droite!*

La voix résonna comme une avertissement dans sa tête, son regard se braqua discrètement dans cette direction et elle aperçue un homme, habillé en côté de maille et armée d'une épée simple et d'un rondache. Il suivait le même chemin que l'elfe et son compagnon et jetait de petit coup d'oeil vers eux pour ne pas les perdre. Elle reprit sa route en gardant un oeil dessus mais savait qu'elle ne risquait rien ici.

*Sauf un coup de couteau dans le dos...*

Même si quelqu'un veillait dans son dos, un homme suffisamment doué pouvait l'avoir sans trop de difficultés. Subitement consciente de l'ampleur du danger elle redoubla d'attention jusqu'à enfin apercevoir l'échoppe qu'elle cherchait. Après un bref échange de parole avec le garde à l'entrée où elle justifia la raison de sa venue, la jeune femme alla à la rencontre du fameux Jaelis. Le bonhomme en question était une montagne, mesurant plus de deux mètres de haut, il était tellement massif que la jeune femme aurait pu entrer un nombre impressionnant de fois dans l'une de ses chemises. Une petite barbe bien taillé, une moustache en croc et une tignasse noire complétait le portrait de cet étrange personnage. Malgré son aspect rustre, ses vêtements plutôt luxueux prouvait qu'il gérait toutes les facettes de son entreprise. Il accueillait tout ses clients lui même mais ne rechignait jamais à aller sur ses propres chantier et travailler avec ceux qu'il employait pour respecter ses délais.
Après une légère inclinaison du buste Tyris entama la conversation

"Bonjour Jaelis, c'est une joie de te revoir. Je suis Tyris Soulless, j'ignore si tu te souviens de moi mais tu avais déjà travaillé pour ma défunte mère."

Un large sourire illumina la face du colosse qui lui faisait face, elle lu dans ses yeux qu'il avait retrouvé qui elle était dans ses souvenirs tant ils brillaient d'amusement.

"Comment pourrais-je oublier la petite terreur aux cheveux blanc qui avait changée par dix fois les plans de sa chambre, fait chuter un échafaudage et subtilisée une caisse d'outil pour creuser un tunnel afin de se cacher de son précepteur. Que puis-je faire pour toi?"

La noble était impressionnée par la qualité de la mémoire de l'entrepreneur, d'un autre côté... Il n'avait pas du connaitre de chantier avec autant de complications très souvent.

"J'aimerais faire reconstruite mon manoir. Je sais ce que tu va dire, la malédiction n'existe pas, elle a disparue avec mon retour. Voilà de quoi t'aider à réfléchir."

Un petit sac d'or sur la table et il céda. L'elfe le connaissait très bien, il respectait ses délais mais sa soif d'or était sans conteste à la hauteur de ses talents!

"Hum... Tu me connais trop bien on dirait. J'accepte mais au premier problème qui me fait penser qu'il se passe des choses pas net avec des fantômes ou autre monstruosités j'annule tout. J'espère que tu sais aussi que mes honoraires sont très élevés."

"La moitié avant, l'autre après. J'ai aussi les plans détaillés de l'ancienne construction mais je voudrais revoir quelques détails avec toi et que je vous donne de quoi passer la grille de l'entrée."

Après un coup d'oeil dans son sac, elle en sortit plusieurs bourses et les ouvrit pour laisser Jaelis en apprécier le contenu. Des sacs d'or et de pierres précieuses, impossible qu'il refuse après avoir vu ça. La noble allait fortement réduire sa fortune avec ses travaux mais à quoi servait l'argent à part être dépensé? Elle tendit aussi les plans à l'architecte qui hocha la tête, reconnaissant son travail.
Ils se lancèrent tout les deux dans une longues discutions qui dura plusieurs heures, heures pendant lesquelles la jeune femme expliqua tous les détails, les délais, les changements à apporter aux plans initiaux sans se presser après avoir vu que Konwen dormait à point fermé.
Tyris savait très bien qu'en plus d'avoir agacé les mercenaires qui avait sans doute attendu dehors, avoir un compagnon en forme serait un plus. Aussi elle prit un thé avec Jaelis en continuant de parler de leur projet commun, l'expert posant les limites possible à l'esprit très imaginatif de la jeune elfe.

Cinq heures avaient du s'écouler et il avait offert de quoi manger à son invité, cette dernière ayant pris soin de demander un plateau pour l'endormi. Bien qu'elle aurait aimée le laisser dormir plus longtemps, il fallait y aller maintenant. Quelques pas la conduire à ses côtés, elle s'abaissa et lui posa un petit baiser sur la joue et murmura doucement son nom avant d'accueillir son réveil avec un grand sourire et un plateau de nourriture encore fumante

Konwen s’était une nouvelle fois endormit sans le vouloir. Mais à vrai dire il n’avait pas de quoi culpabiliser. Le cerveau raplatit, le corps endolorit, le trop plein de questions qu’il se posait, le ventre criant famine et toutes ces choses l’avaient obligé à trouver refuge dans un profond repos. Même son inconfortable position ne l’en empêcha pas.

Une fois encore sa tête bien remplie forma son sommeil. C’était la deuxième fois qu’il s’endormait après sa rencontre avec Tyris et la deuxième fois que son imagination laissait à désirer quant au sens de ses rêveries. La première fois il se voyait dans les nuages malgré l’extrême incommodité se sa position. Et maintenant dans le manoir, qu’il s’inventait ne l’ayant point vu, de son intrigante compagne.

Konwen gémissait. Le noir complet, des cris, des apparitions, des assassins à ses trousses, l’incompréhension du pourquoi et du comment il en était arrivé là. Lui qui ne redoutait pourtant pas la mort, faisant confiance à sa diplomatie ou en cas d’urgence à ses talents d’épéiste, se sentait terrifié.

Puis soudain une lumière blanche, étincelante, rassurante et apaisante… La femme causant tous ses songes apparue au milieu de cette glauque et malsaine ambiance. Un doux parfum, un sourire enchanteur puis tout son mal-être disparu… Il cru même sentir les douces lèvres de la jeune femme effleurer l'une de ses joues tandis que celle-ci lui soufflait mielleusement à l’oreille.

« Konwen… »

L’étrange rêveur se réveilla soudain et devint aussi rouge que ses yeux lorsqu’il aperçut de la distance qui le séparait de celle qui l'avait sortit de sa torpeur. Pourquoi avait-il honte ? Pourquoi se sentait-il gêné ? Sûrement parce que son intérêt pour elle n’était plus qu’une question d’argent. Et c’était cela qui troublait Konwen, jusqu’à lui faire rêver ce genre de chose.

Il évitait le regard de sa pourtant souriante compagne. Le sien en revanche, de sourire, avait complètement disparu depusi un long moment. Il ne lui adressa pas non plus un seul mot et sans aucun geste de remerciement il s’empara du repas qu’elle lui avait gentiment apporté. Cherchait-il inconsciemment à se faire mépriser ? Il n’en savait rien mais son corps, ses yeux et sa voix voulaient échapper à la noble.

C’est donc dans un silence de mort qu’eut lieu le festin de l’affamé. Il n’avait même plus aucune notion du temps. Elle l’avait visiblement laissé dormir un bon moment car mis à part ses courbatures dues à sa position, il se sentait revigoré, vivifié. Il se sentait revivre, tout simplement. Mais malgré cela ses songes n’avaient pas disparus. Et après avoir repoussé son repas pour montrer qu’il avait terminé, il se leva doucement, le regard toujours fuyant puis dit d’une voix sombre, vide d’émotion.

« Nous devrions peut être y aller, qu’on en finisse. »

Tyris regardait toujours le jeune homme avec un grand sourire, se demandant si il était de mauvaise humeur à chaque fois qu'il se réveillait. Elle le laissa manger sans un mot, se contentant de le regarder sans vraiment comprendre comment il pouvait passer de si charmant à si renfermé aussi vite. Toujours est il qu'elle avait fini ce pourquoi elle était venu ici, elle remercia l'architecte et sortie en compagnie de Konwen. Ce dernier avait clairement exprimer le souhait de se débarrasser rapidement d'elle, et bien soit. Il ne restait qu'un détail à régler dans l'immédiat et il lui serait utile pour ce faire.

Un rapide coup d'oeil à la ronde et elle repéra le mercenaire qui la pistait depuis tout à l'heure.

*Deux autres sur la terrasse de l'auberge à ta droite, trois qui discute près de la fontaine et celui qui te suivais.*

Elle les repéra tous en suivant les instructions de la voix, tous bâti sur le même modèle : Armure légère clouté, épée courte, petit bouclier. L'elfe nota que l'un d'eux différait, plus petit mais plus largement bâti, on aurait pu croire que son armure allait exploser si ses muscles se contractaient. Il était armée d'un épée bâtarde à deux main et semblait visiblement commander la petit troupe proche du point d'eau. Elle le connaissait celui la... Il était de ceux qui avait attaqué le manoir!

*Toi, tu va souffrir!*

La noble entraina son garde dans une ruelle plus petite, en complète contradiction avec sa propre directive de rester sur les grands axe, elle s'assura que les autres les suivaient bien. Rassurée elle continua de prendre des rues de moins en moins fréquentées jusqu'à gagner une ruelle complètement déserte. Elle se tourna fait Konwen et lui expliqua:

"J'ai forcé nos adversaires à se montrer, nous allons les affronter ici. Évite juste de tuer le petit avec l'épée a deux main, il est a moi!"

La jeune elfe s'en voulait un peu de l'avoir trainé dans ce guêpier mais seule contre six hommes armés elle avait peu de chance. ellelui offrit un radieux sourire entre excuse et excitation pour le combat à venir.
Tyris dégaina sa lame et après quelques mots glissés au dévoreur elle entama de large moulinet d'intimidation à l'intention des six mercenaires qui arrivaient enfin dans la ruelle, et qui comprenaient que le moment qu'ils attendaient depuis le matin était arrivé: celui de faire verser le sang.

Elle aurait pu se contenter d'attendre qu'ils arrivent et se battre mais soudain, elle fit un pas vers Konwen et lui murmura :

C'est ce que tu voulais non?

A peine avait elle fini sa phrase qu'elle approcha ses lèvres de celle du jeune homme au comportement si incompréhensible et l'embrassa.

Ils sortirent de l’échoppe sans échanger un mot et le trajet fut tout aussi silencieux. Une fois encore Tyris était sur ses gardes, prête à bondir au seul mouvement allant à leur encontre. Rien de très nouveau donc. Mais tout à coup, elle l’entraîna dans une ruelle. Puis une autre, et encore une autre jusqu’à s’arrêter dans une rue dénuée de personnes.

« J'ai forcé nos adversaires à se montrer, nous allons les affronter ici. Évite juste de tuer le petit avec l'épée à deux mains, il est à moi! »

Bizarrement, la première chose que le frappa était qu’elle le tutoyait. Se sentait-elle si proche de lui en deux jours à peine ?

Et surtout, affronter des adversaires ? Il n’avait jamais été question de cela, plutôt de fuir ces prétendus ennemis.
De plus elle lui souriait… Attendait-elle avec impatience que le combat commence ? Il n’arrivait pas à y croire, tout cela pour finalement se battre, lui qui était un pacifiste.

Les assassins ne tardèrent d’ailleurs pas à arriver. Au nombre de six, ils s’immiscèrent dans la rue, face à eux, un large sourire aux lèvres. Tyris dégaina son épée, visiblement toute aussi excitée que les mercenaires… Mais au lieu de se ruer sur eux, elle s’approcha de Konwen et lui souffla.

« C'est ce que tu voulais non ? »

Il n’eut pas le temps de répondre, déjà elle avait posé ses lèvres sur les siennes… Konwen tombait des nues. Il ne répondit pas au baiser mais ne la repoussa pas non plus. Pourquoi agissait-elle ainsi ? S’était-elle aperçue de son malaise et ainsi, en jouait ? Pourtant la phrase qu’elle lui avait murmurée pouvait être comprise de plusieurs façons. Il avait son idée mais n’osait y croire. Et d’un coup, il la plaqua contre un mur, le ton ayant monté d’un cran.

« Ce que je voulais ? Qu’est-ce que vous entendez par là ? Qu’ils nous massacrent pour qu’on en finisse enfin ? Vous ne m’avez toujours pas expliqué pourquoi des personnes sont à vos trousses et je dois en plus me battre pour vous ? »

Les combattants qui ne s’attendaient visiblement pas à une scène de ménage dans une telle situation restèrent plantés là sans bouger. Finalement, Konwen profita de l’incompréhension générale, attrapa brusquement sa compagne par le bras et entama une course folle dans les rues qu’il ne connaissait pas.

« Attrapez-les ! »

Malgré son apparence, le jeune homme courait très vite et se faufilait sans mal dans les angles qui tournaient soudainement. Il parlait entre deux respirations, les nerfs à vif et malgré sa tension, il n’arrivait toujours pas à la tutoyer.

« Il est hors de question que je tue quelqu’un sans bonne raison, même pour vous Tyris. Et il est aussi hors de question que je vous laisse tuer quelqu’un sous mes yeux sans rien faire. Je ne sais pas pourquoi ils vous en veulent, je ne sais pas pourquoi vous avez choisie de m’entraîner là dedans mais maintenant c’est trop tard et je ne vous laisserais pas faire.»

Pourquoi toutes les rues qu’il avait empruntées étaient désertes ? La chance était visiblement contre lui et à sa grande déception, ils atterrirent dans un cul-de-sac. Le temps de reprendre son souffle et Konwen se tourna une dernière fois vers Tyris.

« J’espère que vous êtes consciente qu’ils sont six et nous deux… Vous m’obligez à devoir me battre mais je le répète encore, je ne tuerai personne et vous non plus. Si nous avons la chance de nous en sortir, vous me devrez des explications. »

Le combattant forcé resserra sa main droite sur le pommeau de son épée puis se mit devant Tyris. Les mercenaires les avaient trouvés et s’approchaient, un grotesque sourire aux lèvres.

« Cette fois vous ne vous échapperez pas ! »

Déterminé, Konwen fixa ses adversaires de ses yeux rouge sang. Le combat allait finalement avoir lieu…

Tyris aurait aimé que le jeune homme lui rende son baiser mais elle ferait sans. Brutalement plaquée contre le mur par lui, prit d'un début de colère elle le regarda sans broncher.

« Ce que je voulais ? Qu’est-ce que vous entendez par là ? Qu’ils nous massacrent pour qu’on en finisse enfin ? Vous ne m’avez toujours pas expliqué pourquoi des personnes sont à vos trousses et je dois en plus me battre pour vous ? »

La jeune femme fût ensuite trainée de force, balloté dans les ruelles par un Konwen convaincu qu'il fallait éviter l'affrontement. Il lui expliqua qu'il ne voulait pas tuer. Soit, mais l'empêcher de tuer ces hommes il pouvait faire une croix dessus. Elle se laissa faire, par pure curiosité de voir si il était capable de se repérer dans la ville et la réponse ne se fit pas attendre : non.

« J’espère que vous êtes consciente qu’ils sont six et nous deux… Vous m’obligez à devoir me battre mais je le répète encore, je ne tuerai personne et vous non plus. Si nous avons la chance de nous en sortir, vous me devrez des explications. »

La seule chose qu'elle fit dans l'immédiat fût un sourire, mais dès qu'il se retourna un air amusé pris la place.

« Cette fois vous ne vous échapperez pas ! »*

S'échapper? L'elfe explosa de rire. Elle n'avait jamais eu l'intention de s'échapper! Elle allait les tuer, tous. L'énergie accumulée dans sa main pendant le discours de Konwen et l'arrivée de ses adversaires commençait à frémir, la noble profita que son homme soit tourné et la relâcha en une puissante boule d'ombre qui entama bien ses réserves mais dont l'effet dans la mince ruelle fut dévastateur. L'homme qui la reçu fut propulsé et mit hors combat, mort sans doute. Les autres furent suffisamment secoués pour chuter ou devoir se tenir au mur.

"Alors protecteur? Satisfait? Ils ne sont plus que cinq maintenant."

Elle lui offrit son plus beau sourire, tuer ces hommes offrait un plaisir fou à la jeune femme et en voir un agonisant par terre l'amusait drôlement. Les autres avaient l'air d'hésiter à présent, pas étonnant après l'attaque qu'ils avaient subit mais la elle ne pourrait pas tous les éliminer comme ça, mais comment auraient-ils pût le savoir?

"Oh et... je les tuerais, avec ou sans vous. Des assassins ne mérite pas mieux."

Elle renforça sa poigne sur sa garde et entama de nouveau moulinet de son arme, prête au combat.

A peine eut-il tourné le dos qu’une boule d’ombre propulsa leurs adversaires au sol. Un des leurs eu d'ailleurs la vie arrachée à ce monde, au grand désespoir de Konwen qui se tourna vers Tyris, horrifié.

Pourquoi… ?

Pourquoi une telle joie sur le si doux visage qu'il avait longuement contemplé ? Pourquoi ce sourire terrifiant ? Pourquoi une telle envie de destruction ?

« Alors protecteur? Satisfait? Ils ne sont plus que cinq maintenant. »

Elle souriait… Il en aurait mis sa main à coupé, elle voulait verser le sang. Comment cette femme qui l’avait charmé pouvait-elle devenir si monstrueuse ? Certes il était lui aussi une belle ordure ayant manipulé son petit monde par pur égoïsme, mais jamais il n’aurait pu tuer quelqu’un. Tout se mélangeait dans sa tête, il se mordait les lèvres, ne sachant quoi faire.

« Oh et... je les tuerai, avec ou sans vous. Des assassins ne méritent pas mieux. »

Alors elle l’avait décidé, elle les tuerait, tous ? Ne pouvait-il rien faire ? Il réfléchissait, se creusant les méninges pour trouver une solution au plus vite.

« Si vous les tuez vous deviendrez à votre tour une meurtrière Tyris ! »

Il en était maintenant presque sûr, c’était une vengeance. Sinon pourquoi cette haine à leur égard ? Et pourquoi les traiterait-elle d’assassins…

Pourquoi… ?

Soudain une idée lui vint, mais elle était énormément risquée, surtout vu l’état d’esprit dans lequel se trouvait la jeune femme au sourire haineux. Pourtant Konwen s’élança soudain sur Tyris et la poussa aussi fort qu’il pu. Elle ne tarderait pas à se lever, il n’aurait probablement le temps…
Il sauta ensuite immédiatement sur l’homme à terre le plus proche de lui et d’un geste agile, lui frappa violemment le plat de son épée sur la tête. Un autre accouru aussitôt vers lui. Konwen para son épée, enfonça ses doigts griffés dans l’épaule du mercenaire et profita de ce moment de souffrance pour l’assommer lui aussi.

Malheureusement il avait eu en effet raison. La jeune femme assoiffée de sang s’était relevée et se ruait vers un troisième ennemi, l’épée menaçant dangereusement celui-ci. Au risque de l’abimer, Konwen jeta à contre cœur le bout de fer aiguisé avec lequel il venait de se battre, seul souvenir de son père, puis s’enquit de dévier le coup de Tyris. Il comprit à mi-chemin qu’il n’y arriverait pas, une seule solution s’offrait désormais à lui…

Pourquoi… ?

Pourquoi avait-il fait cela ? Pourquoi ne s’était il pas enfuit pour laisser seule sa terrifiante compagne ? Pourquoi un tel désir d’épargner à Tyris un désastreux massacre ? Il avait mal, terriblement mal, mais il souriait bêtement. Il l’avait empêché d’ôter la vie à un autre homme.

L’idiot inconscient qu’il pensait finalement être s’était jeté sur Tyris. Et dans une brusque étreinte, tandis que la lame de sa protégée s’enfonçait dans son ventre à la place du mercenaire, il lui avait dérobé un dernier baiser.Il ne comprenait toujours pas pourquoi mais maintenant il était trop tard. A quoi lui servirait encore sa fierté d’homme incapable de ressentir quoi que ce soit ?

Et alors qu’il allait ouvrir la bouche pour parler, une gerbe de sang s’échappa de celle-ci. Il ne pu que lui offrir un dernier sourire, un dernier regard intensifié avant de s’effondrer.
Peut être épargnerait-elle les autres adversaires pour tenter de le sauver. Peut être accomplirait-elle sa vengeance à n’importe quel prix.
Et pourtant, même si sa vie ne tenait plus qu’à un fil, même si ses chances d’avoir évité un bain de sang n’étaient pas fiables, une seule vaste question lui trottait indéfiniment dans la tête.

Pourquoi… ?

« Si vous les tuez vous deviendrez à votre tour une meurtrière Tyris ! »

Une meurtrière... Elle avait déjà tué sur un simple coup de tête, pour se défendre et même parfois pour s'amuser alors dans le cas présent, elle ne se considérait pas comme tel. Et puis, quel mal y avait t'il à tuer des ordures? Ils seraient morts bientôt, ça l'elfe l'avait décidée.

Elle ne put formuler sa réponse. Konwen, avec une rapidité qui contrastait avec la paresse qu'elle avait constaté la poussa sur le sol, elle était tellement surprise qu'elle ne réagit même pas avant de toucher le sol. La faible douleur était un détail mais c'était plus la raison qui l'intriguait. La jeune femme le regarda se battre alors qu'elle se relevait, aussi rapide que lorsqu'il l'avait surprise il mit deux de ses adversaires hors combat sans les tuer, leurs infligeant de simple blessures mineures. L'un des mercenaires l'avait contourné et s'était approché bien trop près d'elle, son sourire lui revient et elle chargea, telle une déesse de la guerre dont le coup de manquerait jamais sa cible...

Et pourtant elle la manqua, Tyris ne compris ce qu'il c'était passé qu'une fois le corps du jeune homme contre le sien. Elle se laissa embrassé, toujours sous le choc de la surprise. Il s'effondra après avoir perdu du sang, qui recouvrait à présent le corps de la noble. Elle l'empêcha de tomber en le gardant dans ses bras, pourquoi se sentait t'elle triste à se point alors qu'elle avait juste tué un homme qu'elle connaissait à peine comme elle en avait tué d'autre? La réponse refusait de lui venir et son regard se braqua sur le mercenaire qui aurait du mourir, aussi étonné qu'elle il avait reculé pour rejoindre les autres.

*Tue les, TUE LES!*

La voix du dévoreur tambourinait dans sa tête, il hurlait en la poussant à la vengeance.

*Mais... Et Konwen?*

*Si cet homme était prêt à mourir pour eux, il ne vaut pas la peine d'être sauvé. Maintenant tue les tous!*

Le conflit dans la tête de la femme lui provoquait une intense migraine, il fallait qu'elle les tues elle le savait et pourtant, son coeur lui disait le contraire. La lame, encore plongé dans le corps du malheureux s'illumina d'un halo blanc et une voix douce lui murmura:

*N'oublie jamais, qui tu est.*

*Désolé Vasa...*

Elle tremblait de colère, dirigé autant contre elle que contre ses ennemis. Jamais elle ne pourrait fuir avec un homme dans les bras si ils étaient à ses trousses mais son esprit voyait rouge, elle chargea tout ce qui lui restait de magie et se force frappa le bâtiment à sa droite, au niveau des mercenaires qui furent contraint de se replier pour éviter l'effondrement. La noble avait eu droit à une petite compensation, celui que l'homme qui gisait dans ses bras avait sauvé avait pris le mur entier sur lui, peu de chance qu'il vive encore.

Pliant lentement ses genoux pour ne pas le secouer, elle reposa la tête de Konwen sur ses genoux et le contempla. Qu'il était beau...
La jeune femme retira son manteau et le déchira sans hésiter puis retira avec précaution son épée de son support ainsi que tout le tissu qui couvrait le haut de son corps. Malgré ses piètres compétence de guérisseuse elle lui fit un bandage plus que correct pour freiner sa perte de sang le temps qu'elle trouve quelqu'un de plus compétent.

"Tu ne mourra pas aujourd'hui..."

Et elle l'embrassa, avant de le poser sur le sol le temps de cacher son épée et les vêtements qu'elle lui avait retirée puis rengaina sa propre lame avant de la soulever dans ses bras, à l'identique que lui l'avait portée la veille. Contrairement aux apparences, la noble possédait une musculature rompu au combat et le porta, malgré quelques difficultés jusqu'à une rue plus fréquentée.

La réaction des gens alentours était mi surprise mi compassion. Dans sa colère elle les aurait volontiers tués de la regarder ainsi mais sa vue était concentré sur autre chose:

*Konwen...*

Tyris pleurait, ses larmes perlaient lentement le long de ses joues avant de venir s'écraser sur le visage et le corps de son protégé. Elle demanda plusieurs fois son chemin et trouva enfin le guérisseur le plus doué du quartier. L'elfe se moquait bien qu'il soit occupé et ouvrir la porte d'un puissant coup de pied, laissant les gens qui attendaient visiblement eux aussi des soins ébahis.

"Quelqu'un est plus blessé que lui?"

Son ton était froid et sans appel, personne ne répondit, et elle n'en ajouta pas plus. Elle gagna la salle du médecin et posa son fardeau sur une table prévue à cet effet, le dit soigneur ne fit pas d'histoire de ses manières en constatant la blessure.

"Il meurt, vous mourrez. Il survit, je vous paye autant de fois que vous le voudrez le coût des soins."

Sans attendre, la noble fit volte face et ressortit pour s'asseoir sur les marches de l'échoppe à côté du centre de soin. Elle cacha sa tête dans ses genoux et attendit, toujours couverte de sang mais n'en ayant cure.

Elle pleurait...

Elle hésitait. Est-ce qu’elle hésitait réellement ? Malgré son atroce souffrance il se sentait bien, serré contre son adversaire forcée. Oh… elle tremblait. Est-ce qu’elle avait peur ? Est-ce qu’elle était à ce point en colère ?

Soudain, un violent tremblement. Qu’est-ce qu’elle avait fait ? Il n’avait pas la force d’ouvrir les yeux mais il se doutait malheureusement de la réponse… C’est pourquoi une immense tristesse l’envahit. Elle l’avait finalement fait ? Elle avait tué le restant des hommes ? Sa pitoyable action n’aurait-elle donc servit à rien ? Quel idiot… il pensait vraiment pouvoir l’arrêter ? Qu’était-il au fond ? Une simple rencontre…

Il lui sembla qu’on le posait au sol. Alors finalement elle l’abandonnerait ici ? Quelle ironie… Il ne pouvait s’en vouloir qu’à lui-même après tout. Pourquoi s’était-il entiché d’une femme comme elle ? Un insensible ? A peine au premier regard il avait senti quelque chose. Son esprit soupirait à sa place, pourquoi elle ? Une simple rencontre…

Elle lui ôtait son haut… le dépouillait-elle pour ensuite le laisser ici comme une vulgaire victime ? Non, elle ne se serait tout de même pas rabaissée à cela ? Une vive douleur le remmena à la réalité. Non en effet elle ne le volait pas, elle lui faisait un bandage de fortune. Oh, elle lui soufflait quelque chose…

« Tu ne mourras pas aujourd'hui... »

Est-ce qu’elle voulait vraiment le sauver ? Lui qui l’avait empêché d’accomplir son but, même son devoir peut-être ? Pourtant la colère résonnait dans sa voix qu’il avait connu si douce… Mais un furtif baiser vint calmer ses doutes. Encore un… le premier teinté d’ironie, un deuxième porté dans un élan de désespoir et celui-ci ? Peut-être sous l’effet de la culpabilité. Et encore cette incessante question : pourquoi ? Pourquoi elle, une simple rencontre…

Il sentit soudain qu’on le soulevait. Etait-ce elle ? Il n’aurait jamais cru qu’elle en avait la carrure… Quelle ironie encore une fois, la situation s’inversait, les rôles étaient échangés… Ses oreilles sifflaient, il n’entendait plus que le faible battement de son cœur touché de peu par l’épée dévastatrice.

La pluie ? Non, ce n’étaient que de simples gouttes et de plus elles ne tombait que sur son visage. Pleurait-elle ? Etait-ce pour lui ? Pour sa vengeance inaccomplie ? Tant de questions, tant de troubles, tout cela à cause d’elle, une simple rencontre…

Puis plus rien, le néant, le trou noir.

~~~~

Le médecin qui avait prit le patient sous la menace sortit soudain de la salle. Tous ceux qui attendaient étaient partis. Visiblement beaucoup d’heures avaient passées. Pourtant le guérisseur avait une mine soulagée, plus parce que sa vie n’était plus en danger que parce qu’il avait réussit à stabiliser l’état de son client. Il s’approcha de la jeune femme couverte de sang qu’il n’avait pas convié une seule fois.

« Il n’est pas mort. Son état est stabilisé mais il reste extrêmement faible. Son agresseur n’y es pas allé de main morte, il avait bien l’intention de le tuer ! Son rétablissement risque de prendre du temps. Enfin… »

Le soigneur baissa la tête, visiblement aussi gêné que terrifié par celle qui l’avait obligé à faire des heures supplémentaires. Mais son regard pesant le força à énoncer la suite.

« S’il se réveille. »

Il agita les mains dans tous les sens pour rassurer celle qui pouvait lui ôter d’un instant à l’autre sa vie.

« Mais je suis certain que ce n’est qu’une question de temps ! Quelques minutes, quelques heures… c’est ce qu’on appelle […] »

Blablabla, qui aurait envie d’écouter les explications assommantes d’un homme rongé par la peur de mourir ?

~~~~

Etait-il mort ? S’il ne voyait pas la fameuse lumière blanche était-ce parce qu’on l’envoyait finalement au tréfonds de l’enfer ? Etait-ce la malédiction dont il avait entendu parler ? Deux jours, deux pauvres journées et voilà qu’il agonisait, qu’il avait rompu tous ses principes d’aristocrate cupide, manipulateur et détestable. Tout cela pour avoir voulu sauver l’honneur d’une femme. Tout cela pour s’être épris d’une femme à problèmes, d’une femme au passé sombre, d’une femme aux envies meurtrières. D’une femme si belle, d’une femme si douce, d’une femme si attrayante et désirable lorsqu’elle s'en donnait la peine, d’une simple rencontre…

Il ouvrit enfin les yeux. Il voyait une lumière blanche. Elle l’accueillait finalement. C’était si chaleureux, si réconfortant, si agréable… Mais pourtant sa douleur était toujours là, et un parfum enivrant planait dans cette étrange atmosphère. Un parfum qu’il connaissait… Sa vue se stabilisait. Les rayons lumineux dont il s’imprégnait pour espérer rejoindre le repos voulu s’évaporaient pour laisser place à une image. Un visage penché au dessus de lui, le visage de Tyris, de celle qui avait chamboulé sa vie à jamais, de celle dont il s’était rapproché malgré ses efforts pour la fuir, de cette simple et désastreuse rencontre…

Qu'il était long... La jeune femme aurait pu s'endormir si elle ses nerfs n'était pas autant à vif: la tristesse avait laissé place à l'angoisse qui la rendait particulièrement colérique et dangereuse.

« Il n’est pas mort. Son état est stabilisé mais il reste extrêmement faible. Son agresseur n’y es pas allé de main morte, il avait bien l’intention de le tuer ! Son rétablissement risque de prendre du temps. Enfin… »

"Enfin quoi?"

« S’il se réveille. »

Avait elle mal entendu? Ce médecin voulait il mourir? L'elfe pensait avoir été claire sur son sort si Konwen ne s'en sortait pas. Il du comprendre puisqu'il agita stupidement les mains et enchaina en vitesse un ramassis de paroles incompréhensibles. La jeune femme le fit taire et posa les affaires qu'elle avait récupérées à ses côtés avant de nettoyer son épée.

"Je serais la pour son réveil, n'oubliez pas notre marché."

Et elle sortit du cabinet sans s'occuper des explications sans intérêt du médecin qui se plaignait d'être attendu chez lui. C'est deux heures plus tard qu'elle réapparu et se posa au chevet du jeune homme qui ouvrit enfin les yeux quelques dizaines de minutes après son arrivé.

Le regard de la noble se ficha dans celui de son garde et elle lui offrit un léger sourire avant de lui caresser la joue du dos de la main. Il était si frêle... Si pâle... Elle avait envie de le protéger, surtout qu'elle était la responsable de cette blessure. Le médecin restait dans un coin et n'osait plus bouger, elle le congédia d'un geste de la tête.

"Revient demain matin tu aura ton argent, je dors ici avec lui."

Cette fois encore son ton n'invitait pas à la discutions et l'homme s'exécuta, bien heureux de s'éloigner de cette folle. La noble reporta son attention sur le blessé, son ton changea radicalement pour redevenir doux et attentif.

"Soit fier héros... Tu a sauvé la vie de cinq assassins en te sacrifiant. Je les ai juste mis en fuite."

C'était un beau mensonge: Deux étaient morts dans l'éboulement et en attendant son réveil l'elfe avait traquée et exécutée les trois autres. Elle repensa brièvement au visage terrifié de leur chef alors qu'elle le tuait doucement... Mais ses funestes images furent bien vite remplacées par une choses qui l'importait bien plus: un être, encore vivant celui la. Lui cacher la vérité ne lui plaisait pas mais elle était convaincu que ça l'aiderait à guérir plus rapidement. Sa main glissait inconsciemment sur le torse de son protégé et la jeune femme le regardait toujours avec intensité.

Tyris murmura, s'approchant doucement de lui:

"Celui là... Je ne te le vole pas..."

Et pour la quatrième fois de la journée leurs lèvres entrèrent en contact. Elle profitait cette fois de toutes les sensations que l'étreinte lui offrait, espérant que son partenaire ne lui refuse pas.