Rencontres dans les Jardins Enchantés [Terminé]

Et hop, un arbre d'évité. Re-hop, un deuxième. Je courrai dans une espèce de verger depuis environ une heure, et ça commençait à faire long. Pas âme qui vive, à part les différents animaux qu'on trouve habituellement dans ces endroits. J'avoue que la non-présence des parasites géants qu'étaient les représentants de l'espèce humaine dans la plupart de cas avait tendance à me soulager. Je ne suis pas réellement et totalement misanthrope, quoique... On va simplement dire que je n'aime pas l'espèce humaine. Même en étant un représentant de cette catégorie animale.

J'en étais à ces considérations lorsqu'une racine décida de me rappeler que j'étais dans un verger et qu'ici, c'était les arbres qui faisait la loi. Je tombais. Ou plutôt non, je volais. Je me préparais au choc inévitable dans un arbre... Sauf que ça n'arriva jamais. Je traversai un mur de verdure comme une fusée, et arrivait dans une espèce de bassin naturel. Mon plongeon fut académique. L'élan donné par la racine, l'angle d'attaque du plan d'eau... Tout semblait calculé. Sauf que techniquement, j'étais habillé.

Je remontais à la surface facilement, l'eau était loin d'être profonde. Et à ce moment précis, je remarquais que je n'étais pas seul. Je ne sais pas si vous avez déjà connu ces moments de gêne ou vous voudriez à tout pris être ailleurs, vous essayez de rentrer même dans le décor, mais rien n'y fait vous êtes toujours là... Bah à ce moment-là c'était ça. L'inconnue, parce que oui, c'était une fille, incontestablement, était... et bien, visiblement en train de prendre un bain lorsque je déboulais. La, elle était sur le point de me massacrer à coup de naginata, ce qui était loin de mes propres projets de carrière il faut l'avouer.

Pour ma part, j'avais les joues en feu et une tendance à regarder ailleurs. Bizarre, non?

" Euuuuh.... Bonjour? "

Je ne pus sortir que ces mots-la. Je cherchais vainement quoi dire, mon regard essayant désespérément de ne pas se focaliser sur la belle en tenue d'Ève. Je ne savais absolument pas comme elle allait réagir à mon intrusion, si elle allait décider de m'occire sur le champ ou si elle allait tenter une approche plus... pacifique, mais je me tenais prêt malgré les apparences. Après tout, je ne souhaitais pas me faire embrocher, ce qui mettrait en péril mes plans de carrière.

Elle était fâchée. Très fâchée. Très très fâchée. Voir carrément furax. Et me menaçait. D'une longue, très longue lance. J'étais... dans une situation assez dangereuse.

*Maman m'avait pourtant dit de ne jamais, au grand jamais énerver une fille...*

Je me hissais hors du bassin, d'un geste souple et rapide. J'étais trempé comme une soupe. Littéralement. Et, pour une raison purement technique, je ne pouvais pas franchement me déshabiller afin de sécher mes vêtements, sous peine de subir un empalement rapide et définitif. Je soupirais, condamné que j'étais à rester mouillé pendant un certain temps.

" Vous pouvez ranger votre arme, mademoiselle, je n'ai aucune intention de vous nuire, ni de vous affronter de quelconque manière que ce soit."

Pour appuyer mes dires, je déposais doucement mon katana au sol. Le lieu était paisible et calme, je n'avais pas tellement envie de débuter un combat ici... Je me retournais, dos à la fille, et commençai à parler.

"Je peux faire un feu si vous voulez, afin de sécher les vêtements. je vous proposerai bien également de partager mon repas, c'est le moins que je puisse faire pour réparer mon erreur. Ah oui, et mon nom est Vagiel, ancien habitant d'Umbra, aujourd'hui vagabond entre les mondes. "

Je ne savais absolument pas quelle allait être sa réaction, si elle allait choisir de m'embrocher comme un vulgaire poulet ou si elle allait se calmer. Je n'avais pas envie de combattre, mais si elle m'y poussait je saurai me défendre. Autour de nous, les bruits habituels de l'endroit reprenaient peu à peu, perturbés qu'ils étaient par ma course folle à travers la verdure et par mon atterrissage impromptu dans le bassin.

Je me détendis en entendant la réponse de la jeune fille dans mon dos. Elle n'allait visiblement pas m'embrocher pour le moment, geste que j'appréciais grandement. Bon, certes, on sentait encore une petite pointe d'agacement dans sa voix. mais il est vrai que je n'avais pas été d'une très grande finesse, empilant les gaffes. D'abord le plongeon, ensuite la fixer alors qu'elle était... enfin bon. je l'entendis sortir du bassin derrière moi, puis s'habiller. Un son que je n'arrivais que trop bien à définir, celui d'un pansement que l'on change, parvint à mes oreilles. J'allumais un petit feu sans trop de difficultés, étant habitué à vagabonder sur les chemins, et commençais doucement à sécher près de ce dernier.

Pour toute victuailles, je n'avais qu'un peu de pain et du fromage. Cependant, je partageais de bon cœur avec Serena, puisque c'est ainsi qu'elle s'appelait. Elle s'était rhabillée, ses cheveux d'un blanc pur bordant son visage, descendant bas dans son dos. Le soleil continuait peu à peu sa route dans le ciel, et autour de nous, tout était paisible. Je me détendais de plus en plus, apaisé par l'harmonie de l'endroit. Grignotant mon morceau de pain, je répondit tranquillement à sa déclaration sur les esprits de ce lieu:

" Vous savez, irriter les esprits d'un lieu est la dernière chose que je ferai. J'ai fait trop d'erreurs dans mon parcours jusqu'ici pour refaire cette dernière. "

Je souris doucement, plongé dans mes pensées. Des souvenirs lointains me revenaient, du temps ou j'arpentais sans cesse Umbra afin de perfectionner mes techniques au sabre. Lors de ces voyages, j'avais énormément appris, mais également perdu beaucoup. Des images de mon passé me parvinrent, des visages d'amis perdus, des ennemis, abattus loyalement. Je soupirais. Cette époque était loin, et... terminée. J'avais tourné la page en pénétrant dans ce portail qui m'avait propulsé sur Harmonia.

" Dites-moi Serena... J'ai vu que vous étiez blessée... Voudriez-vous que je regarde la plaie? Je peux peut-être vous aider. Mes années de solitude en Umbria n'ont pas été de tout repos, et je peux vous assurer que j'ai eu plus que mon compte en blessures en tout genre. Et si vous ne voulez pas, peut-être pourrez-vous me raconter comment cela vous est arrivé? Je suis quelqu'un qui aime les histoires quand elles sont bien racontées."

J'attendais sa réponse, assis sur le sol, souriant. Je ne savais pas si elle allais accepter, après tout nous ne nous connaissions absolument pas. Mais si je pouvais l'aider un peu, je n'allais pas m'en priver.

Décidément, autour de ce feu de camp, l’heure était à la nostalgie. Entre moi qui avait des réminiscences de mon passé, et la demoiselle qui me racontait l’histoire de sa blessure… On ne peux pas dire qu’on parlait de sujets très joyeux. J’allais même commencer à déprimer si ça continuait… Dans un endroit aussi magnifique ça serait le comble, non?

Je m’alarmais quand la chouette de ma compagne commença à faire des siennes. Je ne sais pas si pour un volatile c’est normal, mais moi, quand quelque chose commence à partir en live à côté de moi, tout en faisant un boucan d’enfer, alors que jusqu’ici il avait été calme, je m’inquiète. Et quand en plus tous les alentours se font silencieux, c’est encore pire. Je me redressais, à l’instar de Serena, l’arme à la main, prêt à affronter ce qui allait surgir de la végétation. L’adrénaline commençait à monter dans mon organisme, tandis que les secondes passaient et que la chose se rapprochait… Chose qui se révéla être une jeune femme, qui semblait être… umbrienne? Mais ça commençait à devenir un rassemblement, la, fallait faire quelque chose! En tout cas, elle avait de la voix. Pour le prouver, son hurlement en direction de Serena. Visiblement elle la connaissait. Et l’appréciait. Enfin… Si j’en jugeais par sa puissance de frappe vocale. Moi, je me détendais un peu, reprenant un pose un peu moins agressive, mais les sens toujours en alerte pour prévenir toute attaque.

Je ne dis rien, attendant de voir la réaction de Serena. Je ne savais pas du tout comment la nouvelle arrivante allait me voir, comme une menace, un allié… En tout cas… Son arrivée avait été au moins aussi tonitruante que la mienne, donc… Je n’étais pas déshonoré sur ce plan-là!